Dans notre société de l'information, il est dans l'air du temps de parler de « savoir ». Difficile, la tâche qui consisterait à parler du savoir en faisait fi de la complexité de la relation qu'il entretient avec des concepts tout aussi actuels notamment l'information, la connaissance ou, dans une certaine mesure, l'innovation. Ces trois éléments sont tellement liés que des non-initiés peuvent se perdre dans leur signification en les utilisant indifféremment. Et pourtant, proximité sémantique ne voudrait pas dire synonymie. Aussi proches que soient ces éléments, ils ne sauraient signifier la même chose au risque de devenir interchangeables.
Cette subtilité de la relation est encore plus marquée quand on voit que les trois concepts constituent les fondamentaux d'une nouvelle expression « économie de l'immatériel » dont l'objectif principal est d'optimiser la valeur de la connaissance, de l'information, et du savoir pour améliorer la créativité et l'innovation (Musso 2005).
La capacité d'innovation d'une organisation, d'une société serait donc ancrée dans son aptitude à transformer ses actifs de connaissances plus ou moins organisés et individualisés en « intelligence stratégique collective ». Faudrait-il encore être capable de cartographier ses propres connaissances ?
Dans les sociétés africaines, plus particulièrement au Sénégal, la problématique de capitalisation des connaissances est très actuelle. Il faudra, préalablement réfléchir sur les possibilités d'un état des lieux de la connaissance scientifique en essayant de répondre à cette interrogation : savons-nous ce que nous savons ? (Jacob and Pariat 2002). Une question d'autant plus complexe que dans nos sociétés de l'oralité marquée par moins de « formalisme », il est difficile de « savoir ce que l'on sait réellement ». La majorité de nos connaissances explicites ou implicites n'étant pas consignées dans des manuels ou des modes d'emploi faciles à consulter, mais dans les cerveaux des hommes (connaissances indigènes). « En Afrique, un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brule », constatait Amadou H. BA.
Une cartographie des connaissances ne saurait, ainsi, être exhaustive dans une telle société. La visibilité scientifique des universités en souffre énormément. L'absence de structures ou de dispositifs institutionnels de collecte et de signalement des résultats de recherche en est la principale cause. La rétention de l'information, la résistance des chercheurs sénégalais à vulgariser leur production par le biais de l'internet en est une autre.
Et pourtant la visibilité scientifique fait partie des critères d'évaluation du classement de Shanghai. À partir de la production scientifique des enseignants et chercheurs de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, il est, tout de même possible, d'amorcer un travail de recensement des savoirs visibles sur dans les serveurs et bases de données scientifiques dans une perspective de capitalisation de la connaissance scientifique et technique de cette institution d'enseignement et de recherche. C'est le travail que nous nous proposons de réaliser dans cet article. Une analyse bibliométrique à l'aide du logiciel Bibexcel permettra d'avoir une idée de la productivité des différents instituts de recherche, des relations entre les auteurs et les concepts (cooccurrences) (Persson 2008). Une analyse comparative avec d'autres universités permettra de mesurer la visibilité scientifique de l'UCAD. Des propositions seront faites en matière de signalement, d'accès et même de valorisation et de capitalisation afin de permettre à l'université de réaffirmer son impact dans la créativité et l'innovation dans nos sociétés.
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